Johannesburg (awp/afp) - L'annonce mardi du groupe minier britannique Anglo American de son intention de se délester de la célèbre société de diamants De Beers, qui a longtemps dominé le marché mondial, survient alors que le secteur subit la concurrence des pierres synthétiques et une demande volatile.

Fondée en 1888 en Afrique du Sud par le colon britannique Cecil Rhodes, la société De Beers a longtemps dominé le marché du diamant en Afrique australe, de l'extraction à la vente des bijoux. Le poids lourd est aujourd'hui détenu majoritairement par Anglo American et à hauteur de 15% des parts par le gouvernement du Botswana.

Anglo-American a annoncé un projet de scission de plusieurs activités dont le platine et les diamants en Afrique du Sud, après le rejet d'une nouvelle offre de rachat (OPA) de son rival australien BHP.

Les diamants nourrissent l'imaginaire du luxe et restent associés aux bagues de fiançailles ou autres joyaux royaux, mais Anglo American parie sur des perspectives de croissance plus sûres en voulant se centrer sur le fer et le cuivre moins glamours, les cours de ce dernier s'étant dernièrement envolés.

A l'annonce du projet, le PDG de De Beers, Al Cook, a promis dans un communiqué de s'engager dans une nouvelle stratégie se disant "convaincu que l'entreprise restera le leader du diamant pour le siècle à venir".

Mais selon des experts du secteur interrogés par l'AFP, la décision d'Anglo American reflète un marché du diamant concurrencé par le secteur des pierres fabriquées en laboratoire et un ralentissement de la consommation en particulier en Chine.

Diamants moins chers

Selon l'expert indépendant basé aux États-Unis, Paul Zimnisky, les prix des diamants ont chuté de 25% à 30% depuis début 2022. Et "la demande a connu une volatilité très inhabituelle au cours des quatre dernières années", a-t-il expliqué à l'AFP.

Le diamant a mieux résisté que d'autres produits de luxe au ralentissement économique mondial lié à la crise du covid mais le secteur n'a pas rebondi aussi rapidement après la pandémie.

Une des principales causes est l'essor des diamants de laboratoire, alternatives bien moins coûteuses que les pierres précieuses extraites des mines par De Beers. Les gemmes de synthèse ont bousculé le marché ces dernières années, d'autant que les mines traditionnelles sont de plus en plus chères à exploiter.

"Les bijoux en diamants de laboratoire représentaient moins d'1% du marché mondial il y a dix ans", rappelle M. Zimnisky. "Aujourd'hui, ils pèsent plus de 20%, les consommateurs étant attirés par des prix beaucoup plus bas" jusqu'à 90% inférieurs à celui d'un diamant naturel comparable.

Un autre facteur est l'affaiblissement de la demande en Chine, deuxième plus grand consommateur de diamants après les États-Unis, où les dépenses en consommation n'ont pas rebondi après la pandémie.

Mais pour Edahn Golan, consultant dans le secteur du diamant, Anglo American pourrait toutefois manquer de clairvoyance en lâchant De Beers.

Selon lui, les consommateurs américains considèrent les diamants de synthèse comme un produit d'entrée de gamme plus accessible mais ils aspirent toujours à acheter in fine des diamants naturels.

afp/rp